Marc
Perrone est fils de parents immigrés italiens de Monte Cassino, dans
la Ciociara. «Je
suis né à Villejuif,
le 8 octobre1951,
l'année du pastis», dit-il en se marrant. Après on a habité à Gentilly
puis à La Courneuve, à la Cité des 4000.»
Marc Perrone a grandi en banlieue et découvre Brassens et Ferré à
la radio dans l'atelier de tailleur de son père.
Il
a des copains d'origine espagnole qui jouent du Brassens à la guitare.
«Ça m'a plu et j'ai commencé à gratouiller comme tout le monde. Brassens,
du folk américain, Bob Dylan, Joan Baez et consorts avant de me prendre
de passion pour le gospel, le blues rural de Leadbelly, Mississippi
John Hurt ou Big Bill Broonzy. De fil en aiguille, j'ai fréquenté
le TMS, le folk club américain de la rue de l'Abbaye.»
Après
avoir été comédien et marionnettiste au théâtre d'Aubervilliers dans
une troupe de théâtre pour enfant, il découvre l'accordéon diatonique.
«Un jour, à la Fête de l'Huma, j'ai entendu un groupe de musique cajun
avec un accordéon diatonique à dix boutons et deux basses. Ça a été
le déclic. De 1973 à 1978, je suis allé vivre dans le Sud-Ouest, à
Agen, avec un groupe qui s'appelait Perlimpinpin Folk. Avec Marie-Odile,
ma compagne, nous sommes partis ensuite faire du collectage de musiques
traditionnelles dans les Landes".
Il
se produit pendant 5 ans dans le sud ouest avec le groupe "Perlimpinpin
Folk" puis s'engage un peu plus tard dans le mouvement "Folk".
Outre
ses activités de concertiste, Marc Perrone enseigne l'accordéon et
la musique traditionnelle. En 1978, il enregistre un premier disque
constitué d'airs traditionnels, de compositions personnelles ainsi
que d'un arrangement d'une chanson de Georges Brassens.
En
1982, c'est le grand tournant. Marc Perrone est invité à jouer à la
Fête de l'Huma par Marcel Azzola - un de ses modèles, devenu depuis
un grand ami. Pendant la répétition, deux types l'écoutent avec attention
et viennent le féliciter, enthousiasmés. «C'était Bernard Lubat et
Michel Portal! Je ne les connaissais pas!»
C'est
en 1984, dans « Un dimanche à la campagne », le film de Bertrand Tavernier,
qu'on a découvert Marc Perrone et sa musique limpide. Rêve de guinguette
d'antan, valse et mélancolie dans une lumière de soir d'été : on ne
l'a plus jamais lâché. Il est aujourd'hui cette sentinelle qui se
tient à la croisée de tous les chemins de traverse. Musette, chanson,
films « musiqués » en direct (un CD, « Ciné Suite », au Chant du Monde),
théâtre (avec Fellag), improvisation libre (avec Bernard Lubat, Jacques
Di Donato, André Minvielle...), il ne voit pas de différence : «La
chanson, l'impro, c'est pareil. Pas de partition, il s'agit d'habiter
le moment où l'on joue, à fond.»
Au
même moment, Bertrand Tavernier le repère dans « la Trace », un film
de Bernard Fabre où il avait un des rôles principaux avec Richard
Berry et pour lequel il avait composé une valse, finalement pas retenue.
«Quelques mois plus tard, Bertrand m'appelle : «Fabre n'a pas voulu
de votre valse, eh bien moi je la prends pour mon film.»» Ce fut une
belle année.
"C'est
le poète de l'accordéon Il ressuscite les guinguettes d'antan et les
airs de 1936. Ses nouvelles « P'tites Chansons » font notre bonheur
Cet homme est un magicien. Trois petites notes sur son accordéon,
et hop, il escamote tout : les murs de la salle de concert, le fauteuil
inconfortable, les projos. Et soudain tous ces gens que vous ne connaissiez
pas il y a encore dix minutes, voici qu'entre rires et larmes vous
chantez avec eux à mi-voix « Guili Guili », une petite chanson sur
la mort écrite avec des CM2. Marc Perrone va souvent jouer dans les
écoles des quartiers difficiles. Il en est sûr : l'art sauve. Une
échappée belle. «C'est par où? C'est par l'art», dirait son ami Bernard
Lubat. L'espoir est là. Son nouveau CD s'appelle " les P'tites
Chansons de Marc Perrone". Rien que du bonheur. Ça réveille la
mémoire enfouie des petits bals perdus et des feux de la Saint-Jean,
des grévistes de 1936, des films de Renoir.
Marc
Perrone vous ouvre sa porte. Vous voyez d'abord son sourire lumineux.
Puis la chaise roulante. En 2004, il a sorti un disque intitulé «
Son éphémère passion ». On a tout de suite pigé : les initiales de
ces trois mots renvoyaient à la saleté de maladie - une sclérose en
plaques - qui l'a progressivement handicapé. Tous les matins, Marc
Perrone lui fait un bras d'honneur. Un jour à Tourcoing, le lendemain
à Uzeste pour improviser avec Bernard Lubat, Michel Portal ou André
Minvielle, il ne cesse de bouger et de vaporiser du bonheur autour
de lui. D'où tient-il cette énergie invraisemblable, cet amour de
la vie ? Un de ses grands-pères italiens s'appelait Amabile, Aimable
en français. Ça doit être ça.
Un
quart de siècle plus tard, Bertrand, Michel, Bernard et les autres
sont toujours là. L'amitié, c'est le secret de Marc Perrone.
Marc
Perrone a enregistré huit albums. Au cinéma, il a joué dans « la Trace
», de Bernard Fabre (1982), et dans « Un dimanche à la campagne »,
de Bertrand Tavernier (1984). «Ciné
Suite», au Chant du Monde.
Son
dernier CD : «Les P'tites Chansons de Marc Perrone» (Azimuth/l'Autre
Distribution)